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Baobab et Harmonia Mundi
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Un pays que je n’ai point visité
nomme « porte » un certain arbre
assorti du paradoxe qu’il serait
à la fois bas et haut On rapporte
que ces géants sacrés peuvent
survivre plusieurs millénaires
Pourquoi sacrés ? Mon hypothèse
est qu’ils sont chacun le symbole
de l’univers à la fois infime et
immense ainsi que le professait
celui que la plupart des gens
prennent aujourd’hui pour un
théorème – un certain Pythagore !
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Fragments insomniaques d’années perdues
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Plus tard le vertige, plus tard l’ivresse
au-dessus des libations dans les cendres
assombries…
. La flûte infinitise la nuit...
Le halo laiteux sur la bourgade en bas
dans la vallée,
. pressentiment d’aube...
Un oiseau inquiet crie dans les bambous
qui en sont chiffonnés…
. La mer fleurit :
odeur naïve, le jour,
. bouton que dénoue
le parfum irradiant du coeur de la fleur :
ce reflet de sourire sur un anneau d’or !
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Ne parlons pas de Mai dont les giboulées
tardives secouent muguets et valérianes
anémones et ancolies -
. astres d’espoir !
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Moralité sans fable
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Opiniâtrement les antiraciste font très attention
à l’inclusion de quotas de gens de races définies
dans les diverses institutions et groupes sociaux
du pays où ils agissent. C’est assez bizarre que
pour être de bons antiracistes, il faille distinguer
les humains d’une morphologie ou d’une autre
et prêter la plus grande attention à leurs traits
distinctifs… Il s’ensuit que cette énergie mise à
agir contre le racisme a pour effet de renforcer
la conviction que les races existent : troublante
observation dont je tirerai la règle générale que
très souvent, à combattre une chose, on l’affirme...
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Ramsès
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C’est un cliquetis qu’on ne peut entendre / que seul j’entendis autrefois dans les fastes efflorescents du crépuscule / parmi les dunes au désert / il fait penser
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au bruit du squelette / quand le professeur de sciences-naturelles déplaçait la potence de bois auquel il pendait / pour le remporter dans la resserre
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à côté des globes terrestres et des grandes cartes Mercator / qu’on accrochait au tableau noir lors des cours de géographie / mais à côté aussi des éponges, des compas et règles géants de bois teint en jaune / et de tout un bazar entrevu dans la pénombre
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avant que la petite porte bleue ne se referme / trac-trac deux tours de clef / sur ses trésors et ses fantômes / On imaginait en riant sous cape / que le personnage fait d’os enfilés comme des perles / qu’on surnommait Ramsès
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dansait la gigue au secret de son cabinet noir / au-milieu de la sarabande des objets divers / accumulés par des années d’enseignement de profs et de potaches blanchis non pas sous le harnois / mais sous la poussière de craie
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Cependant le moment le plus saisissant fut un jour / où nous ayant vus chahuter à l’entrée en cours / avec ledit Ramsès pour le faire tinter comme au vent un carillon de bambou chinois /
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le prof de sciences-nat qu’on avait surnommé Lagrenouille / nous apprit que les os de Ramsès avaient jadis appartenu à un être humain vivant / qui avait légué son squelette pour notre instruction / et méritait le respect
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(C’est / dans les fastes efflorescents du crépuscule / un cliquetis / pareil aux pluies de criquets sur les sables / voire au piétinement crissant des pas de quelque Baron Samedi / que j’entends aujourd’hui comme jadis au désert / je l’entendis...)
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L’insidieux désastre
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Lourd et sombre le cap lévite
sur la pâleur grise de la Méditerranée
Entre les branches sans feuilles
le ciel couvert de nuées grises
inspecte lentement le littoral de sable noir
comme s’ils enquêtait
sur l’acide solitude qui ternit le paysage
.
Ne revenez pas ici mouettes blanches
même les bataillons du ressac
n’osent plus arborer leurs cimiers d’écume
pour combattre la grève et ses timides graminées
pour rejeter et reprendre et rejeter les détritus de plastique
sacs bouteilles d’eau minérales flacons de crème solaire
vieux pneus qui ont roulé jusqu’à en crever
Ici est le monde tel que les humains
l’ont désenchanté
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Trois lignes crues
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Du moins les choses sont-elles claires à présent
L’humanité ne fera rien ni pour sauver
la Terre ni pour se sauver elle-même…
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Glaciation
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Toi qui voulais à la façon
du vent qui lustre le paysage
rendre aux choses leur ancien orient
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Les enrober d’aube irisée
ainsi que l’huître qui nacre l’intrus
irritant comme l’est quand
on se promène tel petit caillou
faufilé dans notre soulier
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Toi qui pensait enrober de rêve
tout cela qui n’avait encore jamais
fait rêver personne
et qu’on résume par « modernité »
.
voici que peu à peu à ton insu
c’est la vie qui a fini par t’enrober
de sa froide réalité
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Le silence des oiseaux
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Il existe des couleurs
qui vous touchent d’une manière
qu’on réussit rarement
à partager avec quiconque
par exemple mes yeux
ont une prédilection
pour le vert des jeunes poireaux
pour le mauve passé de certaines
roses trémières qu’on peut voir
dans les vieux jardins de curés abandonnés
ou encore pour le jaune dédoré des asters
qui fanent au long des palissades argentées
Les odeurs aussi sont impartageables
le lavandin aspic la résine de pin les giroflées
l’humus humide des sous-bois
la coucoune orange qui sent la châtaigne crue
la glaise des bords de ruisseau
que le fenouil parfume
ne sont pas les plus appréciées
Quant aux chants des oiseaux
jadis aimés de tous et en toute contrée
ils se raréfient au point que peu de gens
ont une idée de la symphonie
de leurs cris oubliés
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