• Incompréhensible poétique

    Incompréhensible poétique

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    Tu te veux poète ? Râcle au fond de toi ce qu’il te reste d’assez pur pour ne connaître dans la poésie que la poésie.

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    La poésie qui soutient une cause n’est pas poésie. Qu’elle semble servir une cause ne doit être qu’un point de vue de lecteur.

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    Ce qui fait écrire (ou parler) en poèmes n’a rien à voir avec les ambitions qu’on croit déceler en eux.

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    Le poème ne démontre pas. S’il est poème, il fait éprouver. Il n’explique pas, il inspire.

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    Un poème qui inspire rayonne son sens différemment lors de chaque rencontre, et selon la personne qui l’aborde.

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    S’habituer à la zone ouverte, autrement dit chaotique, bizarre, absurde, maladroite, de la parole en poème, c’est s’accoutumer à un sentiment de perte.

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    Tout poème véritable est à mon sens un langage métonymiquement entier qui espère son salut de la réalisation de cette virtualité grâce à l’esprit des humains qui le liront.

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    Insérer un cheveu dans une robe de mariée, la même démarche que poser une ligne d’encre sur une page.

     

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    Sursaut de sérénité

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    Il m'arrive d'être en prison

    dans ce que faute de mieux

    j’appelle souvent mon âme

    Je la vois comme un étang

    avec sous ses reflets carpes

    et grenouillettes et flottant

    quelques feuilles aplaties

    en forme de coeurs verts

    parées d’un lotus épanoui

    dont les étamines dorées

    sont le trône d’un crapaud

    face au ciel en extase assis

    tel un petit magot ventru

    ou le bûmisparcha mudrâ

    du Bouddha sculpté en jade

    qui attendrait sur l’eau une

    lumineuse risée de sagesse

     

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    Pour l’autre A.

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    Athéna fille d’une goutte d’eau (dit-on)

    sortit tout armée de la migraine de Zeus

    Voilà bien un mythe digne d’un proème

    armé de pied en stiche de silences d’or

    Moi comment appellerai-je cette Beauté

    fille d’une goutte d’encre et de mon mal

    de tête, de coeur, de vivre et d’exister ?

     

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    Nuit du ruisseau sans nom

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    Ce vieux poème qui tracasse ta conscience

    Son langage couleur de lune qui voudrait

    te rendre lucide Bref - insomniaque tu es

    sorti en pleine nuit d’août alors que tous

    dorment dans leurs maisons acagnardées

    aux immenses pins touffus silhouettés

    sur le fond étoilé du firmament Tu as

    enjambé le grillage Un chat s’est enfui

    à droite sur le chemin des Chauves

    Toi c’est à l’opposé que tu a choisi

    d’avancer vers le carrefour et la route

    en pente qui descend jusqu’au ruisseau

    L’ombre cernait le petit pont de bois

    éclairé par la corne d’argent là-haut

    comme par un projecteur de théâtre

    Appuyé à la rambarde brangeolante

    tu regardais le miroir d’eau paisible

    où des étoiles de chewing-gum blanc

    se contractétiraient inlassablement…

    Un clic de l’eau ou bien un clouc-clouc

    de temps en temps rythmait leur

    lumineuse gymnastique Et parfois

    silencieux et vif sur le ciel violet

    glissait le vol fantasque sitôt disparu

    d’un vespertilion pareil à la pensée

    graves ou funèbre qui sort des obscurs

    recoins de l’esprit pour y retourner

    en jetant comme les poètes des cris

    inaudibles - dans toutes les directions !

     

     

    Opio-2018-19

     

     

     

    Inflexible

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    Lorsque tombent les premières

    gouttes de pluie elle voit de petites

    ailes d’anges irisées

    Elle en parle avec cette élégance

    du geste et du port de la tête

    qu’on nomme grâce

    Malgré la voûte des cieux gris-de-zinc

    comme un vieux couvercle

    de lessiveuse, elle enlumine

    des onciales de son imagination

    la page non-écrite encore

    de la journée

    Qu’elle m’accueille ou me repousse

    elle reste l’être au monde

    le plus digne d’amour

     

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    Passé présent

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    Près du pot de grès

    au fond du jardin

    j’ai vu l’oiseau mort

    Un grain d’éternité

    dans son œil luisait encore

    (C’est la force du souvenir)^

    Je prends son aile raide

    qui se déploie en éventail

    Sous l’olivier où je l’enterre

    dans un vieux plumier en bois

    La terre est noire et rouge-sang

     

     

     

    Lassitude du Scribe

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    Tout bien pesé la vie végétative

    arbres légumes chiendent sainfouin

    ce ne doit pas être si mal Poussées

    de sèves ou retraits pour uniques

    soucis métaphysiques Le soleil

    et la pluie pour dieux à l’instar

    des Aztèques Les brises qui vous

    feuillettent (semble-t-il) espérant

    des oracles qui ne seront jamais

    articulés Oh oui La vie végétative

    du scribe auquel le vent n’impose

    nullement d’écrire alors que l’aube

    pose un diamant sur des milliers

    d’oreilles vertes aux nervures fines

    qui n’entendent que la lumière...

     

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    Inaccessible
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    Cette espèce de coeur sans coeur

    ce coeur de mots qui est en toi

    comme l’obscur d’un rêve silencieux
    au cours duquel on déchire maint chiffon doré

    Un coeur en lequel s’épaissit l’obsidienne de la nuit

    Autrefois c’était d’un autre qu’on disait

    Il a encore toute sa tête Bientôt sans doute

    c’est dans ton dos qu’on le dira

    en provoquant l’ombre d’un doute

    qui s’allongera ainsi qu’en fin de jour

    nos silhouettes noires sur le sable

    infini d’une plage du Nord

    qui ne parvient pas à rejoindre ses nuages

     

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