Dès potron-minet
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Ce matin, seule l'exubérante floraison du laurier rougit une aube crémeuse fouettée par les plus hauts arbres. En sourdine la radio zinzinule ainsi qu'un frelon perdu.
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Que de phrases et de scies à la mode qui s'envolent, inécoutées, dans l'air vide. On dirait la mer lorsqu'elle désespère au long du strand de trouver un coquillage.
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Ou le poétaillon tandis qu'il tourne autour du lieu de son inspiration sans discerner parmi toutes les fleurs celle dont le pollen miellé de rêve embaumerait sa vie.
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Une guêpe
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Le vent va et vient. La guêpe, mince tigre volant, cherche autour de la table un ami sans le trouver. On la chasse à grand renfort de serviettes. Comme elle ne renonce pas, on la piège sous un verre retourné, dont elle arpente fébrilement l'invisible voûte.
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Elle sera relâchée plus tard. Ici, l'on respecte même ceux des vivants qui recèlent dans leurs façons d'être ou leurs obsessions des nuisances potentielles. La futilité nous sert de refuge : quelques moments de paix face aux déboires de ceux que nous aimons.
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Nos vies ne sont pas occupées de notre destin, qui ne nous importe presque plus, mais de celui des êtres promis à nous succéder sur notre planète, dans notre pays, dans notre sphère, famille, amitiés, naissances, quand l'univers s'est durci de nos inconséquences...
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Recensement d'une sérénité
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Les jeux vifs des écureuils qui le long des troncs
vertigineux en spirale se poursuivent et disparaissent
sous le vert couvert des feuillages qu'à peine atteint
à leur sommet une couronne de soleil levant...
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Lorsqu'en descendra jusqu'au sol le niveau de lumière
ce sera le signal de l'effervescence des oiseaux.
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Les sangliers se refaufileront sous le trou de la clôture
pour échapper au jardinier pris d'une fureur noire
en découvrant son potager
ravagé ! Mais ils sont si beaux les petits marcassins
rayés qui trottinent à la queue-leu-leu !
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Et la mère fonce à travers les buissons comme si rien
n'était obstacle – au point qu'on se demande
par quel miracle elle frôle sans les percuter les fûts
serrés du sous-bois... Ombres si fraîches des roseaux !
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Belles sont les heures du pays natal ! La jeune femme
qu'on croise près de la fontaine et qui porte, hirsute
et rigolard, un bambin sur son bras nu, tout en
discutant du dernier commérage avec une rencontre.
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Le faucon crécerelle qui file sur le ciel en planant
« aussi vite qu'un pet sur la toile cirée », disait en riant
le garde-forestier, cigarette éteinte au coin du bec.
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Les colombes roses qui s'obstinent à rourourourer
d'un toit à l'autre pour réchauffer l'air jusqu'au moment
où les violons des cigales acceptent de jouer
enfin leur partie ! Doucement, doucement, ici,
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s'étirent les heures au gré du vent léger
qui rebrousse nos cheveux et la toison des oliviers.
Vu du TGV
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Lumière de chez moi – tu m'apportes les vignes
de la mer, l'alcool rosé des airs de mer quand s'attarde
le soir sur les ondulations des Maures, le couchant
sur le brushing en coup de vent des pins maritimes
modelés par le souvenir insistant du Mistral...
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J'anticipe, depuis le wagon qui m'emporte et distend
les visions passées vers l'arrière, la rumeur des cigales,
les amours rauques des tourterelles roucoulant parmi
les chaumes et la terre rouge des champs déjà labourés.
Mon oreille devine autour de la fontaine, ombragée
d'immenses chênes empanachés de leur propre majesté,
les mille petits cris des passereaux, je sens la fraîcheur
humide et la margelle où ça volette et se dispute
à grand renfort d'ailes effarouchées, pour un grain
de fluide reflet, vivement picoré avant qu'on regagne
l'abri touffu des branches...
. Demain, demain le silence
de Midi s'alliera au feuillage argenté des oliviers
pour y respirer les effluves excitants du jasmin.
Sur le plateau les lavandes empruntant le bleu du ciel
s'exposeront aux rebuffades du vent qui sournoisement
joue à déséquilibrer le promeneur. Au café d'en-bas
nous boirons un pastis verdâtre, avec des amis au fort
accent local. Nous seront en famille ainsi qu'autrefois,
en un coin retiré, sur une terre aimée que la modernité,
en dépit de ses tentatives, n'a pas réussi à défigurer.
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Impalpable rencontre
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Une brise de charme, fraîche et nue, cherche son chemin parmi les fleurs. L'air d'une naturiste, elle folâtre en consultant les coquelicots, dont les oracles l'étonnent au point de lui faire lever les deux oiseaux noirs qui lui tiennent lieu de sourcils.
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Il va de soi qu'à cette heure matinale, il n'y a personne d'autre pour l'apercevoir et lorsque le soleil sera plus chaud et plus haut, que les randonneurs bâtés de sacs flashy commenceront à sillonner le paysage, elle ira se réfugier sous l'ombre des pins, auprès des cigales.
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Pour moi, qui ne suis guère plus consistant qu'une sorte d'elfe enflé par les conséquences de trop d'années d'incertitude, passées à vaguer d'un pays à l'autre sans jamais y retrouver la teneur de l'atmosphère natale, j'aurai déjà regagné mon asile et je m'y ferai du thé.
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Ce que nous ignorons
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M'est avis que tout poème doit accéder à sa nuance propre de naïveté rouée. Comment fixer autrement l'Apparition ?
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Le poème s'autorise, ses questions sont sui-generis : logique et raison y sont subalternes et marginales, en somme la dernière roue du carrosse !
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Tellement habitués à ce que le chaos ait pris sens grâce à la langue maternelle dont ils sont les héritiers, qu'ils n'ont pas conscience que leur monde, c'est elle.
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Sur le plateau où les astronomes ont installé leurs coupoles blanches, le silex de l'azur aiguise le regard que sur nous portent les étoiles.
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Est-ce à force d'aimer que le jasmin jette l'invisible maillage de son parfum sur tout ce qui l'entoure, sans emprisonner pour autant ses conquêtes ?
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Par le Six des lis, ce que l'on appelle âme, qui nous anime en effet, s'ouvre au soleil et fomente des étamines riches d'une poussière d'or dont elle ne peut plus se défaire.
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Nuages de Provence
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Les nuages de chez moi depuis toujours
prennent volontiers des profils d'animaux :
doués pour les métamorphoses, ils narguent
les cimes des pins unijambistes qui, cloués au sol
brun des restanques, frissonnent et grincent
de toutes leurs aiguilles, en pleurant de rage
des larmes dorées ! Pour saluer mon retour,
tel cirrus fait cygne, tel autre prend l'air vache
- du genre anglo-saxon qu'on nomme sea cow ! -
puis s'habille en fantôme et pointe le nez par-dessus
le faîte du toit, ou sur le côté de la cheminée...
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Ainsi sont les nuages imaginatifs d'ici, bien différents
de ce plafond d'ouate mal cardée, uniforme et grise,
qui le plus souvent assombrit le regard du citadin,
au dessus de la grande ville bientôt flagellée de pluie.
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Retour à l'éternité
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Le volet ouvert dans un grincement de feuilles sèches
sur le carrelage de la terrasse, voici le jour, en face :
paré d'un laurier aux fleurs pourpres et d'un olivier
que joyeusement rebrousse l'illumination du matin.
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Au delà, le haut cirque des chênes et le ciel d'un bleu
qu'atténue par moments une laiteuse brume de chaleur.
La mer n'est pas loin, sombrement étrillée par le vent.
Du creux de la vallée, assourdie une rumeur humaine
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parvient jusqu'à moi, telle une basse continue sur quoi
brodent leurs arias toutes sortes d'oiseaux aigus et gais.
On ne croirait pas qu'existe encore une pareille forme
d'éternité que l'envol des ans ne laissait pas pressentir.
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Morgane disparue
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Absente quelques jours, la fée ailleurs s'amuse
et le vent ride le lac sans plus que ses ondes n'aient
le moindre sens. Sans doute l'eau a-t-elle perdu
la mémoire ! Quand à l'enchanteur, il reste sec !
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Partir, inévitable cruauté de l'absence ! Sommeil
trembleur des peupliers blancs qui flexibles font signe
à leur insu, juste comme refait surface la tortue
d'eau, cette île minuscule nageant vers la rive…
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A-t-elle, au fond, vu la bulle où le château hérissé
de Morgane dresse ses tourelles, pareil au contenu
d'un cristal presse-papier de Noël en lequel il neige,
pour un temps sans fin retourné comme un sablier…
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C'est l'absence. Avec son interrogation qui sans fin
recommence. Avec la neige du sommeil qui tremble
sur les peupliers blancs. Avec toutes les autres chères
choses délaissées qu'a ternies l'absence de la fée.
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Recette excentrique
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Parfois, dans mon délire intime et personnel,
je me dis que me parle mieux une balle de sein,
voire une basse de lin, qu'une salle de bain…
J'aime ces irréalités farfelues que font surgir,
impromptu, des interversions de syllabes !
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Plus bizarre encore : ces personnages ou lieux
mystérieux qui d'objets du quotidien surgissent :
telle Lucette de Noleil, ou l'Habère de Potes...
Je me plonge dans l'étymologie pour apprendre
ce que cachent les noms, je m'en fais des romans.
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Il se passe parfois des bifurcations plus simples.
Un homme debout se change en homme de boue :
le voici Golem propre à retenir, sur le chemin
de l'école, les gamins tentés de sauter à pieds joints
dans les flaques sans souci de maculer leurs habits.
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Ce n'est là qu'un conte qui commencerait, parmi
tant d'autres – le Petit Poucet prétexte du Piteux
Souper, et hop une nouvelle histoire ! Bref : j'ai la clé
pour m'enchanter tout l'été, et quand viendra la bise
sur ma joue, je nous réciterai la Fourmâle et la Sygui,
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à moins que tu ne préfères le Cornard et le Robot...
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À l'abandon
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La poésie, parfois, me fait la même impression que ces baraques à l'abandon, toits à demi-crevés par le poids des hivers anciens, au milieu d'immenses prairies en Alberta par exemple.
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Des pionniers courageux, héroïques, humbles, loin de tout, y ont vécu, enfanté, lutté contre le sort pendant un siècle ou deux ; puis leurs descendants éperdus de solitude ont cédé.
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Ils se sont rapprochés des cités des hommes, en quittant à jamais leurs exigences d'aventure et de liberté, l'hermétisme du langage des forêts et prairies qui n'ont pas de limites...
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Adieu, Rimbaud, Verlaine, Laforgue, Baudelaire, Corbière, Mallarmé et tant d'autres ! La langue des cités vous remplace, rap, slam, et autres performances à la mode.
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Plus d'azur avec trombes, de bleu gangréné d'orages du nord au sud, plus de grandeur qui dépasse l'humain, plus de prières au grand Wacondah ou au Manitou maître des nuages rouges.
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La seule clarté devient glauque, les vapeurs sont pollution et poussière jaunâtres, les logis sont de béton et non de bois de sycomore, la vie n'y est plus que vol, viols, meurtres et mesquineries.
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Lorsque le soleil tente d'assainir les rues compissées des hommes et des chiens, de sécher les puanteurs d'urine et les déjections, apparaît nue et grise l'horreur des choses. Et la nostalgie des splendeurs perdues.
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Écho intemporel
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En cette paroi calcaire habite la nymphe Écho,
locataire de l'Insaisissable. Volontiers elle répond à
la mince Syrinx, entre mes mains, qui (dit le mythe)
jadis fut sa fille... Avec la complicité du temps
nous formons une sorte d'orchestre dont Pan,
s'il est caché dans les environs, doit être assez fier !
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Mélancolie des tubes et des gammes doriennes...
Il y siffle et chuinte, alliée au timbre des notes,
un peu de la lumière de l'Hellade antique, celle
qui parmi les arbres de Judée en fleur d'Olympie,
relevait les colonnes les temples et les ruines
dans mon âme qui volait à travers les siècles...
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Me revient en mémoire au pied du mont sacré,
le grand corbeau qui s'envola vers le soleil.
Une voix brûlante me parlait, qui pour d'autres
n'était rien que silence. Parmi les énormes
tronçons cannelés du temple de Zeus écroulé,
rôdait encore un peu de l'éternité des dieux...
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Appareillage du poème
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D'un poème qui émerveille comme un grand voilier
sous la lune au temps de la Compagnie des Indes – il
approcherait et jetterait l'ancre parmi les reflets
instables du port -, c'est là ce dont j'écris sans fin.
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Au matin, dans la rumeur, les allées-venues des
barques jusqu'à lui chargeraient-déchargeraient aux
quais d'énormes ballots pleins de superbes choses
exotiques, vaisselle chinoise, bouddhas dorés...
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Un fatras qu'en tranchant les cordons et les jutes
d'emballage on laisse, en vrac scintillant, s'étaler
face aux acheteurs dont les yeus ronds rétrécissent
pour évaluer objets ou denrées qui seront leurs cibles
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Jusqu'à la volée de sonneries des carillons de midi
rythmant le flottement des flammes et oriflammes :
échos cristallins entre les maisons qui ressemblent
fort à celles du Graslei, à Gand, le long de la Lys...
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Un poème fait de peu mais un peu fée, oxygéné,
magique, plein de princesses en tuniques de soie
diaprées qu'en débarquant l'on voit chanceler par
symétrie dans l'eau qui tremble sous la barque...
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Déjà les voiles vertigineuses sont déroulées et
tombent mollement qu'une risée de temps à autres
gonfle d'un vague espoir de nouveau départ, si bien
qu'est hurlé du pont l'ordre d'enfin déraper l'ancre.
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Vaches
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Ta mémoire aurait-elle ainsi que l'estomac des vaches, plusieurs poches afin que tu puisses régurgiter puis ruminer à l'aise des touffes de ta vie passée avant de les digérer ?
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Les vaches m'ont toujours impressionné par leur taille, leur placidité, leur cuir, leur clarine clopin-clopante, leur paire de cornes parfois élégantes, leur sabot fendu, leurs bouses.
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Surprise que soudain queue haut levée, l'une d'entre elles fiente sans cesser d'avancer en balançant le col, pis ballants et roses, museau en avant avec reniflements humides et rythmés !
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Le plus émouvant pourtant, de certaines belles du troupeau qu'il m'arrivait de garder, c'était leur tête levée, ruminant à hauteur de mon front, et les longs cils d'un oeil insondable...
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Quelqu'un au font de cet oeil me regardait, patient, d'une animale sagesse, s'interrogeant, quand je posais le cube de sel, sur mes intentions, avant de le lécher consciencieusement.
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En un site mystérieux de ma personnalité, cette placidité bovine, la sereine beauté de cette prunelle où brillait une étincelle d'intelligence différente, ont accompagné toute ma vie.
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Escapade
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Ce qu'il y a là-haut, c'est la montagne avec l'air
comme un violon, son arche et le col au fond.
La brise lève-tôt, fraîcheur, transparente résine
du pin de l'aube à la fois psaume et supplique...
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Par la garrigue errant, tu croises le chemin traînant
de la cistude circulant entre les fourrés desséchés.
Une insistante odeur de thym précède le soleil
qui d'autant de doigts radieux multiplie les ombres.
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Je froisse un épi de blé sauvage pour en mâchonner
les grains, retrouver le goût des vadrouilles de jadis,
lorsque, gamins, par monts et par vaux tout le jour,
cheveux au vent nous explorions l'intime splendeur...
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Midi venant, tel un vol de passereaux on pillait
les framboisiers ou les mûriers qui enronçaient
les clairières. La forêt offrait toujours une souche
où s'asseoir en mangeant pour observer aux branches
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le ballet fou des écureuils - qui n'ont pas le vertige !
Parfois c'était une ou l'autre fillette de la bande
qu'on regardait avec insistance à la dérobée pour
le sentiment bizarre que procuraient ses yeux noirs...
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Enfin s'éloignait l'orée du monde que nous avions
créé ; les panaches dorés du soir couronnaient
au loin les dentelles des bois noirs et des éminences.
Un ultime nuage rouge, ceint des premières étoiles,
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se faisait un devoir de nous raccompagner chez nous.
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