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Par Xavier.Bordes le 20 Juin 2019 à 11:07
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Épair et manque
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Serrer le vent, tirer des bords
au plus près, que la voile couleur de cerveau
ne désemplisse jamais
du lumineux élan qu’imprime l’Invisible
fût-ce au risque de chavirer
tel soit le programme de ton odyssée
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Stable instable
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Ce qui est beau est apothéose du Réel.
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Sous le Chaos une virtualité d’ordre s’épanouit en pivoine.
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J’apprécie dans les œuvres d’art des anciens Grecs, le souci d’humilité.
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Le Réel, c’est le constat de vivre, lorsque l’esprit en saisit l’essence. Le reste est fiction.
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Le rêve de ce qui est : l’inchangé. Or, même la pierre des statues vit.
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Le désir, c’est imaginer que ce qui manque vaut mieux que ce qui existe.
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Sous la plage, les pavés. L’inverse de tes croyances naïves de jadis.
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L’imaginaire participe au réel comme ses nageoires extravagantes à un tosakin.
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Ah, ces mots inexpérimentables : éternité, infini, divinité, liberté, et ainsi de suite !
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Escapade
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Une quinzaine de moutons sur la pente
Des rochers percent ici et là le velours de la prairie
Au fond du paysage le tsunami pétrifié
des Alpes bleues crêtées de blanc
que traversent les troncs proches d’un bouquet
de pins noirs épongeant le vitrage de l’azur
où par les yeux la pensée plane à la suite d’un faucon
De mon sac je tire un thermos de thé auquel j’ai mêlé
six feuilles de verveine Sitôt béant l’anneau de son col brillant
attiré par cette sorte de miroir aux alouettes
le soleil y glisse une ou deux pennes d’or
si bien qu’avec le thé je bois sa lumière infuse
et dans l’air pur qui déploie les parfums végétaux
divers de l’estive, je respire l’intemporel
bonheur de me sentir chez moi
quand même brusquement je réalise
assis à mon bureau qu’aujourd’hui tout cela
n’est que songe et réminiscences
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Pensant à Don Pedro
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Échapper, certes, mais à quoi
et gagnant un ailleurs qui serait quoi ?
Voyagerais-tu au pas balancé des fameux
quatre méhara d’Alfaroubeira
jusqu’au fin fond du Paumékistan
que cela ne te débarrasserait pas
de tes peines obèses, de tes maigres joies
et surtout de tes quatre vérités
Autant de compagnies encombrantes
dont aucun paysage aussi merveilleux soit-il
ne distrait jamais longtemps
Yourtes décorées d’entrelacs multicolores
parmi les immenses vallonnements de Mongolie
Forêts malgaches avec les célèbres
makis mococos fausses peluches à la queue rayée
Montagnes des Appalaches avec troupeaux méfiants
de broncos pie bais qui descendent jambes
raide en avant boire aux fleuves
Jonques sur le bleu semé de pics étranges
de la célèbre baie d’Along chères aux touristes
Glaciers craquants en longs échos à travers le sombre
blizzard des cordillères de Patagonie
Quel tour du monde si stupéfiant, prenant,
exotique, impressionnant soit-il, pourra jamais
détacher quelqu’un de celui qu’il est,
excepté s’il consent à le payer de sa vie ?
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Calern
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Les lointains bleuissants s’éloignent
de plus en plus
. le ciel distant surplombe
de son mépris le passage des saisons
Sur la lande vibrent les grappes de soufre
erratiques des buissons rampants
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On entend claquer du bec un oiseau caché
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Mon obsession de le mettre en poème
ne l’intéresse pas davantage que le mistral
qui s’y reprend à plusieurs fois sans succès
pour obtenir un moulage de ma face
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Aïlenn est très loin là-bas près de la mer
vers le cap où s’accroche un dernier nuage
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J’aimerais sentir sa main dans la mienne
(2001)
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Grillon des bastides
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Laqué noir, ce grillon qui contourne l’immense roselière
qu’est pour lui une touffe de graminées
s’arrête ensuite un moment à l’ombre d’un caillou
médite en orientant ses antennes,
joue quelques martelés de son microviolon stridulant
pour vérifier que son ré# est juste
Par l’imagination un instant je m’installe
dans son petit corps multipattes et lustré
J’accueille les ondes venues m’apporter leurs messages
secrets des quatre points cardinaux
et je les traduis en morse pour que ma grillonne
m’entende et me rejoigne cette nuit
sous les hautes étoiles qui par antennes de lumière
à travers l’infini échangent constamment
leurs ondes inaudibles…
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Ostinato malinconico
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Écrire : trois arbres transparents
au sein d’un hiver de neige pure
emmitouflant des collines illimitées
sous lesquelles la musique limpide
des ruisseaux est changée en trajets
de cristal sous lesquels au ralenti
les poissons en de moëlleux nids
de vase hibernent avec insouciance
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Trois arbres gribouillés en bleu pâle
au milieu d’une étendue immaculée
Serait-ce qu’un dieu enfant est passé
graffiter sur la paroi de brume qui clôt
d’une feinte impasse les perspectives
Et pourquoi ce brusque éblouissement
alors qu’un corbeau on ne sait d’où sorti
deux fois plus noir que noir s’essore
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N’écoute pas le cri du corbeau ma Belle
ma Lointaine toi si légère que tes pas
ne laissent point de traces, si ce n’est
à m’efforcer de te suivre, les miennes
inégales maladroites et dont le vent
recouvre l’hésitation sous le charitable
et virevoltant voile d’une poudreuse
argentée comme le sable du Temps...
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Courlis cendré
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Ôô-oui Ôô-oui… acquiesce en hochant la tête
avant de triller un courlis au long bec arqué
qui arpente le littoral sans s’inquiéter de moi
En retrait au loin le petit port de Carry-le-Rouet
et la fête de baptême pour le bambin Antoine
dans la vaste salle vitrée qui donne sur la mer
Ce jour-là sous le sable j’avais trouvé une cuillère
à café couverte de concrétions et coquillages
minuscules Depuis je l’ai remise à neuf Elle brille
et je l’utilise tous les jours pour faire semblant
que les années n’ont point passé Certes un jeu
vaguement stupide mais dans ma mémoire
le soleil de l’azur était si lumineux qu’à ce que
j’en murmurais gaiement pour moi-même,
la réponse du courlis confirmait que la clarté
de ces heures-là recelait un grain d’inoubliable
.
Escale à tort !
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Cette nuit à Roscoff en 1965
Il bruinait – gâchis et sacrifice
Les vitres de la Simca ruisselaient
tandis qu’on stationnait devant un bistrot
pour voir s’ils louaient des chambres
.
Un homme en balançant est sorti
dans l’éclairage rouge du vitrage
et il est parti silhouette noire de dos
d’un pas chaloupé sous la pluie
ivre sans doute il chantait à tue-tête
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À l’intérieur - que de rudes marins
aux visages ridés par la mer et le sel
Sombres, engoncés dans des vareuses
Ni une parole ni seulement un regard
Derrière le bar l’homme a simplement,
.
en essuyant un verre avec un chiffon
douteux, jeté un « Non ! » hostile alors
je suis retourné à la voiture Ma montre
indiquait presque minuit On a démarré
et fini par dénicher un hôtel je ne sais où
.
Homo homini lupus
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Que la plupart des humains sur cette planète
s’organisent avec tant de persévérance pour
fabriquer leur propre malheur me laisse pantois
.
On dirait que comme les lecteurs de thrillers,
de livres d’horreur ou les amateurs de films
d’épouvante ils sont si peu sensibles qu’ils
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n’ont jamais assez d’émotions violentes On voit
qu’ils n’ont rien gardé en eux de ce poétique
dont a été un temps éclairée leur enfance
.
Alors, anesthésiés de la part de poésie qu’ils
ont scellée dans une oubliette de leur moi
ils ont besoin de cruauté d’angoisse de haine
.
de férocités variées pour se donner pendant
une heure ou deux l’illusion de se sentir
d’un frisson plus vivants que dans leur vie
.
Calembours de trente-six mille habitants
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« Si t’es gai, ris donc, mais si t’es pas gai, rame ! »
Ce calembour qui ravissait mon grand’père
m’a toujours semblé receler un sens caché.
Les grands-pères sont souvent détenteurs
de phrases énigmatiques dont on ne détecte
la teneur en sagesse que tard dans la vie…
J’attends qu’Ezra ait encore un peu grandi
pour lui transmettre cet héritage séculaire :
je ne voudrais pas qu’il passe à côté d’une
formule précieuse ni qu’il pense comme Hugo
que les jeux de mots sont à prendre à la légère !
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Vers l’Avenir en chantant
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À l’évidence, il faut oeuvrer avec sérieux.
Ce n’est pas le moment de faire de l’humour
dans les difficultés où nous sommes…
Chacun doit consacrer son énergie entière
au Plan : il n’y a pas de place pour le luxe
d’en gaspiller en rigolade, fût-ce une miette.
N’oublions pas que nous sommes au XXIème
siècle et que tout se joue maintenant !
La Parti attend de chacun qu’il joue son rôle
en donnant le maximum pour réussir…
Les individus, les personnes, les préférences,
les sentiments, toutes ces balivernes
des sociétés décadentes sont concepts
obsolètes. Nous sommes une Collectivité
Planétaire qui doit mobiliser ses forces,
toutes ses forces, vers le But sans dévier.
À notre grand regret les déviants seront
sévèrement châtiés, car la situation est telle
que nous ne pouvons pas consentir
à compromettre l’Avenir pour une poignée
d’individus, quelles que soient leurs excuses,
qu’ils se disent « artistes », « écrivains »,
à fortiori « poètes » : ce à quoi dans le passé
se référaient ces mots n’a désormais plus cours.
Une seule pensée, le Grand Bond en Avant ;
un seul Peuple, un seul Parti, un seul Inspirateur.
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Perte d’inconscience
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L‘ardoise bleu-pastel du toit de la montagne
s’orne d’un panache digne d’un volcan
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Le ciel refuse partout ailleurs qu’aucune vapeur
aux allures de meringue ne se condense
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Touchantes batifolent et gaîment se culbutent
dans les hauteurs de l’air deux tourterelles
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Qu’il serait apaisant pour l’âme d’éprouver
la même roucoulante insouciance ailée
.
Impossible pour moi d’élucider pourquoi
je suis hélas bien incapable de les imiter
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Pouvoir oublier le passé comme l’avenir
au profit de la seule minute présente
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quelle bénédiction ce serait - Analogue à
plonger l’été dans la fraîcheur de la mer !
votre commentaire -
Par Xavier.Bordes le 20 Juin 2019 à 11:06
Désagréable lucidité
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L’attention que beaucoup d’amis poètes / accordent à toutes sortes de détails du monde contemporain / indistinctement dans leurs écrits divers événements insignifiants en côtoient d’autres décisifs pour l’avenir du vivant / me plonge, comme on dit, dans des abîmes de réflexion
.
J’en retire que le détail inscrit dans chaque texte / pour acquérir une teneur « poétique » se doit de receler un essentiel / non-dit mais intensément pressenti / afin que le lecteur apporte sa part de création qui fera le poème « poème » / et qui forme au-dessus de lui cette sorte d’aura troublante
.
par la grâce de laquelle on entre-sent ce qui est dissimulé / on entrevoit de l’ineffable / au-delà de notre perception habituelle d’un environnement matériel / et de la création du monde personnel qui pour nous en résulte / Cependant il faut reconnaître ici que si l’on n’accède pas à cette magie du langage
.
ce que l’on appelle « poème » par pur orgueil et besoin de survie, lorsqu’on ne se supporte pas en tant qu’humain anonyme, au-milieu de l’anonymat de milliards d’autres / ira rejoindre la grêle saisonnière de livres destinés à nourrir de leurs vers / les amateurs surnommés vrillettes, poissons d’argent et autres bibliophages...
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Dimanche 2 juin 2019
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Non ! Je n’écoute pas le soleil dehors
qui perché au touffu du grand bouleau
à contre-jour en grattouillant du bec
s’épouille des derniers morpions de nuit
encore cramponnés sous son radieux plumage
.
Qu’importe s’il craille et craille
comme une corneille
de peur de passer inaperçu
tandis que remonte ébloui le volet roulant
pour qu’Aïlenn les yeux fermés
dans son nid de draps embrouillés de blondeurs
d’où s’échappent ici et là genou bras épaule nue
(Des autres charmes je me réserve la vue)
alertée par l’odeur du café se retourne, s’étire
et me sourie en clignant ses yeux d’eau verte
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car ici-bas je préfère au phénix des matins ma douce
fée-nixe à moi dans la minute où sa beauté s’éveille
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Sans Moi
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Mais où s’enfuit, mais où
s’enfuit cet oiseau transparent qui pleure
Redoute-t-il, redoute-t-il
un tremblement de coeur
Une sorte d’immense frisson qui secouerait
l’âme en ses plus fines ramifications
.
L’ébranlement qui secoue la pensée,
qui en propulse l’écume illusoire
jusqu’aux rivages du néant
Là où vous quitte tout ce qu’on aime
où l’on finit comme un squelette de bois flotté
mais impalpable comme un souvenir de rêve
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Un papillon blanc
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Une gare en pleine forêt – j’imagine ainsi
la Halte : une gare en pleine forêt avec sur le quai
une petite fille blonde en robe blanche
qui attend on ne sait quoi en chantant et sautant
à la corde Un oiseau bleu peut-être
ou quelque train rouge et noir improbable
à voir comme ce lieu sévère est charmant à la fois
paraît désaffecté Sombres alentour les sapins ont grandi
certains même ont envahi l’ancienne route
et près de la voie-ferrée rouillée des pousses
émergent d’entre les pierrailles du ballast
.
Si l’on prolongeait jusqu’à l’endroit en Y
où bifurque une voie de garage parmi les épais buissons
on trouverait sans doute quelque locomotive
abandonnée qui réjouirait mon petit-fils
Pour un peu il y aurait même quelques
wagons aux vitres brisées à la peinture écaillée
Sur les sièges avachis les derniers magazines
laissés par les derniers voyageurs y moisiraient encore
couvertures aux photos pâlies par les saisons
.
Comme Ezra finalement j’aime les lieux abandonnés
Tout y semble plus beau quand c’est reliques de présences
silence des oiseaux et de la lune dans les arbres
avec - qui voltige au fil d’une comptine
d’un coin à l’autre du quai délaissé par le temps -
une petite fille gracile et fantasque ainsi qu’un papillon blanc
.
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Comment trouver la force de caractère
pour regarder ailleurs – mais où ? - lorsque
l’on voit autour de soi comme au-delà de l’horizon
tout ce qui fut notre arbre monde s’effondrer
peu à peu cédant radicelle après radicelle
jusqu’au complet détachement prévisible
sitôt que surviendra le dernier orage
Même le rire de la Valkyrie s’éteint
qui volait, cygne blanc, au-dessus des combats
du temps où son amant luttait seul contre tous
Et s’il reste un soleil son éclat pourpre
est d’un sang qui n’est plus le nôtre
.
Fugace fraîcheur argentée
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Un instant voici l’éclaircie entre les mélèzes
et les nuages complices pour ouvrir un étang
au soleil dont les milliers de doigts vont
au fond de l’eau titiller le silence des carpes
.
Bonjour, c’est moi, dit-il, dis-je aux verdiers et pinsons
qui s’empressaient autour de la clairière ce jour-là
Du moins feignais-je de m’en convaincre en sachant
parfaitement que c’était jeu taciturne avec moi-même
.
Un aubépin piquant au débouché du sentier se prenait
pour une constellation J’appréciais la pénétrante
odeur de clitoris de certaines fleurs un peu fanées
Comme une exhalaison vitale de notre dame Nature
.
Pour un peu je me serais attendu à voir débouler
près d’une nymphe en train de tâter l’eau un faune
aviné aux lèvres cramoisies et crinière cornue prêt
à batifoler jusqu’aux « derniers outrages » priapiques
.
Rien cependant sinon l’invisible du vent qui venait
cueillir dans mes cheveux sa fraîcheur comme si,
par d’immémoriales visions fécondée, elle émanait
d’une imagination que la parole transcrite éternise…Les yeux ouverts
.
Il se trouve que depuis un ou deux lustres
le monde qui est le tien est assombri – tel
un sommet ensoleillé que lentement obscurcit
et cerne un nuage – par la Multiple Menace
.
Te te sens pareil à un oiseau fourvoyé au piège
d’un embrouillamini de ronces pour s’être
laissé attirer par une grappe de baies exquises
Chaque fois pour s’échapper on s’y ensanglante
.
Il te semble tout d’un coup que chaque décision
prise dans ton passé fut une erreur d’aiguillage
Pourtant si tu retournais dans ton état mental
de l’époque tu referais la même aussi conscient
.
qu’en ce temps-là des douleurs que tu te préparais…
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Autopsie
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- Croyez-vous qu’il vive encore ?
- Non.
- Pourtant on dirait qu’il bouge...
- Il est mort, mais il ne le sait pas !
.
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Trois moment d’Isis
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Parmi les vagues une main occulte
recoud les lambeaux de la tunique
du soleil levant,
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En formation serrée
pourchassant l’invisible,
les martinets intatigables,
filent leurs paraboles au-dessus de la mer...
.
Depuis le robinet de l’évier
une goutte sonore fait contrepoint
au clapot du ressac.
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Nouvelles de l’entre deux
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Jeune homme je voulais
dévorer le temps
avoir tout essayé avant qu’il ne me ronge,
me dévore, m’exténue
À vitesse d’aile d’hirondelle
je voulais extraire du printemps
de mes chansons, de mes images,
de mes écrits Après échecs sur échecs
.
pour finir je n’ai ni l’envie de partir
ni l’envie de rester ici
.
J’habite l’interface
le temps ne m’a pas dévoré
Je ne l’ai pas dévoré non plus
Nous nous regardons en chiens de faïence
Mon printemps stupidement s’obstine
Pour combien de temps encore ?
.
Ritournelle face à la baie
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En bas les navettes de la lumière
avec la complicité des mouettes
obstinément tissent la mer
.
Le petit-jour au balcon du quatrième étage
tend des résilles de rayons immatériels
en espérant que s’y prenne
la chevelure d’Aïlenn
.
Se matérialiser en embrouillamini doré
qui sent la forêt, pour y faire son nid
l’oiseau-soleil en a toujours rêvé
.
Moi - sur le littoral de l’aurore
je scrute avec des yeux de crabe
les traces fossiles des monstres
de mes rêves passés
.
Au-dessus des vagues les escadrilles de martinets
filent sans cesse puis reviennent
Je vis avec une ritournelle - dit-Elle…
votre commentaire -
Par Xavier.Bordes le 11 Mai 2019 à 08:31
Baobab et Harmonia Mundi
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Un pays que je n’ai point visité
nomme « porte » un certain arbre
assorti du paradoxe qu’il serait
à la fois bas et haut On rapporte
que ces géants sacrés peuvent
survivre plusieurs millénaires
Pourquoi sacrés ? Mon hypothèse
est qu’ils sont chacun le symbole
de l’univers à la fois infime et
immense ainsi que le professait
celui que la plupart des gens
prennent aujourd’hui pour un
théorème – un certain Pythagore !
.
Fragments insomniaques d’années perdues
.
Plus tard le vertige, plus tard l’ivresse
au-dessus des libations dans les cendres
assombries…
. La flûte infinitise la nuit...
Le halo laiteux sur la bourgade en bas
dans la vallée,
. pressentiment d’aube...
Un oiseau inquiet crie dans les bambous
qui en sont chiffonnés…
. La mer fleurit :
odeur naïve, le jour,
. bouton que dénoue
le parfum irradiant du coeur de la fleur :
ce reflet de sourire sur un anneau d’or !
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Ne parlons pas de Mai dont les giboulées
tardives secouent muguets et valérianes
anémones et ancolies -
. astres d’espoir !
.
Moralité sans fable
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Opiniâtrement les antiraciste font très attention
à l’inclusion de quotas de gens de races définies
dans les diverses institutions et groupes sociaux
du pays où ils agissent. C’est assez bizarre que
pour être de bons antiracistes, il faille distinguer
les humains d’une morphologie ou d’une autre
et prêter la plus grande attention à leurs traits
distinctifs… Il s’ensuit que cette énergie mise à
agir contre le racisme a pour effet de renforcer
la conviction que les races existent : troublante
observation dont je tirerai la règle générale que
très souvent, à combattre une chose, on l’affirme...
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Ramsès
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C’est un cliquetis qu’on ne peut entendre / que seul j’entendis autrefois dans les fastes efflorescents du crépuscule / parmi les dunes au désert / il fait penser
.
au bruit du squelette / quand le professeur de sciences-naturelles déplaçait la potence de bois auquel il pendait / pour le remporter dans la resserre
.
à côté des globes terrestres et des grandes cartes Mercator / qu’on accrochait au tableau noir lors des cours de géographie / mais à côté aussi des éponges, des compas et règles géants de bois teint en jaune / et de tout un bazar entrevu dans la pénombre
.
avant que la petite porte bleue ne se referme / trac-trac deux tours de clef / sur ses trésors et ses fantômes / On imaginait en riant sous cape / que le personnage fait d’os enfilés comme des perles / qu’on surnommait Ramsès
.
dansait la gigue au secret de son cabinet noir / au-milieu de la sarabande des objets divers / accumulés par des années d’enseignement de profs et de potaches blanchis non pas sous le harnois / mais sous la poussière de craie
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Cependant le moment le plus saisissant fut un jour / où nous ayant vus chahuter à l’entrée en cours / avec ledit Ramsès pour le faire tinter comme au vent un carillon de bambou chinois /
.
le prof de sciences-nat qu’on avait surnommé Lagrenouille / nous apprit que les os de Ramsès avaient jadis appartenu à un être humain vivant / qui avait légué son squelette pour notre instruction / et méritait le respect
.
(C’est / dans les fastes efflorescents du crépuscule / un cliquetis / pareil aux pluies de criquets sur les sables / voire au piétinement crissant des pas de quelque Baron Samedi / que j’entends aujourd’hui comme jadis au désert / je l’entendis...)
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L’insidieux désastre
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Lourd et sombre le cap lévite
sur la pâleur grise de la Méditerranée
Entre les branches sans feuilles
le ciel couvert de nuées grises
inspecte lentement le littoral de sable noir
comme s’ils enquêtait
sur l’acide solitude qui ternit le paysage
.
Ne revenez pas ici mouettes blanches
même les bataillons du ressac
n’osent plus arborer leurs cimiers d’écume
pour combattre la grève et ses timides graminées
pour rejeter et reprendre et rejeter les détritus de plastique
sacs bouteilles d’eau minérales flacons de crème solaire
vieux pneus qui ont roulé jusqu’à en crever
Ici est le monde tel que les humains
l’ont désenchanté
.
Trois lignes crues
.
Du moins les choses sont-elles claires à présent
L’humanité ne fera rien ni pour sauver
la Terre ni pour se sauver elle-même…
.
Glaciation
.
Toi qui voulais à la façon
du vent qui lustre le paysage
rendre aux choses leur ancien orient
.
Les enrober d’aube irisée
ainsi que l’huître qui nacre l’intrus
irritant comme l’est quand
on se promène tel petit caillou
faufilé dans notre soulier
.
Toi qui pensait enrober de rêve
tout cela qui n’avait encore jamais
fait rêver personne
et qu’on résume par « modernité »
.
voici que peu à peu à ton insu
c’est la vie qui a fini par t’enrober
de sa froide réalité
.
Le silence des oiseaux
.
Il existe des couleurs
qui vous touchent d’une manière
qu’on réussit rarement
à partager avec quiconque
par exemple mes yeux
ont une prédilection
pour le vert des jeunes poireaux
pour le mauve passé de certaines
roses trémières qu’on peut voir
dans les vieux jardins de curés abandonnés
ou encore pour le jaune dédoré des asters
qui fanent au long des palissades argentées
Les odeurs aussi sont impartageables
le lavandin aspic la résine de pin les giroflées
l’humus humide des sous-bois
la coucoune orange qui sent la châtaigne crue
la glaise des bords de ruisseau
que le fenouil parfume
ne sont pas les plus appréciées
Quant aux chants des oiseaux
jadis aimés de tous et en toute contrée
ils se raréfient au point que peu de gens
ont une idée de la symphonie
de leurs cris oubliés
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votre commentaire -
Par Xavier.Bordes le 20 Avril 2019 à 09:24
La jalousie des « classes dangereuses »
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Ce samedi à Paris est silencieux
dans mon quartier Tôt ce matin
la plupart des habitants sont partis
pour le long week-end de Pâques
Des casseurs fourbissent leurs projectiles
Ils croient la république solide
Ils n’aperçoivent même pas ce qu’ils ont à perdre
comme des ados qui défient leurs parents
et qui n’ont jamais une assez belle moto
une assez belle voiture jamais assez d’argent
pour récompenser leurs activités approximatives
À moins qu’ils rêvent de casser l’État lui-même
comme cela fut fait au temps de la prise
de la Bastille (en laquelle il ne restait qu’un seul
prisonnier fils d’aristo de surcroît et débauché)
Tout ce qu’on détruit dans une société
ne savent-ils pas que ce sont toujours les plus
faibles qui le paieront – même si pour se soulager
la foule en effervescence a coupé quelques têtes
qu’elle estimait indécemment fortunées
et ruiné à jamais quelques chefs-d’oeuvres
que personne ne sera plus jamais capable d’égaler !
.
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