• Exclamations de grâce

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    Quel bonheur pour les anges et les oiseaux que les

    Profondeurs architectoniques d’un immense pin d’Alep

    Quand l’effleurent les premières caresses ambrées

    De l’aurore et que le regard d’un citadin fait le plein

    De ses verdeurs veloutées prospectées par les écureuils

    Qui s’y faufilent vifs comme les ombres d’une vie

    Secrète à laquelle nous humains ne sommes pas conviés

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    Chaque tronc s’éclaire à l’instar d’une colonne rose

    L’éther après la nuit redécouvre la multiplicité des feuillages

    Qui vaut bien le souvenir des étoiles hautaines

    Au milieu duquel un vague nuage s’effiloche comme à regret

    Tandis qu’une cigale hésitante cherche à retrouver

    L’exact tempo de l’ostinato que jouait son archet

    Si allègrement la veille au sein de l’orchestre entier à Midi

    .

    Quelle beauté la fraîcheur nette du matin pour le pèlerin

    Assis à sa table sur la terrasse face au paysage lorsqu’il

    Se met en route pour un poème à l’itinéraire aussi raide

    Et sinueux qu’un sentier enlaçant une haute montagne

    Aussi labyrinthique et riche d’une profusion de possibles

    Que les ramifications intérieures d’un pin compliqué

    En quête de la meilleure manière d’embrasser l’infini

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    Dont circule partout l’invisible oxygène libérateur !

     

     


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  • Réalité compensatoire

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    Longue et lente au vent (comme chevelure de ma connaissance que jalouse volontiers le soleil couchant), cette houppe de nuage au-delà des vergers, puis des villas du front de mer, jusqu’à ce qu’elle se résorbe sous la courbe de l’horizon…

    .

    Plus que jamais impuissant à la suivre, d’autant que mes yeux vieillis n’ont plus l’acuité de chat qui m’autorisait au petit jour à contemple la Corse depuis Roquebrune, je me figure à la barre d’un sloop filant vent debout vers le large…

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    Deux moustaches d’écume à l’étrave, que la tombée du jour rend phosphorescentes ; une sirène non loin de moi sur le plat-bord assise, à demi-repliée, qui chante en un idiome mystérieux dont je m’évertue à vouloir démêler le sens.

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    En faut-il plus si le rêve est intense ? Connectant l’infini du dedans à l’autre, l’infini du monde extérieur, de l’un à l’autre ma joie circule, libre comme une mouette, tandis que je sens mon visage masqué d’une tiède lumière d’or.

     

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  • 27 Juin 2020

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    Sur la paroi de papier ivoire

    en quoi ta tour est édifiée

    tu griffonnes des graffitis

    inspirés par le traîne-savate

    qui déambule sans vrai but

    par les venelles de tes songes

    .

    Aujourd’hui est un samedi

    de portières claquées et de

    coffres engorgés de valises

    À la radio un seul thème

    « Les départs en vacances

    ont commencé. Où aller ? »

    .

    Comme si « le paradis est

    a i l l e u r s » constituait

    un axiome indiscutable

    Pourtant une touffe d’herbe

    anonyme poussée entre

    deux dalles d’un trottoir

    .

    recèle au soleil autant de

    beauté qu’une palmeraie

    dont la banale coiffe verte

    ébouriffe à l’Iroquoise

    les escarpes d’une Île d’Or

     

     

     

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    Introuvable miroir

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    Où trouver le marché aux puces

    dont un éventaire de hasard me proposera

    le miroir-à-montrer-le-monde-en-ordre

    pour délasser ma vision sans cesse

    agressée par le chaos environnant ?

    .

    Ou alors m’affichera un beau désordre

    tel que celui qu’on dit être un effet de l’art ?

    Un beau désordre analogue à celui

    que réussit la Nature sans effort visible

    à toute heure du jour – pour personne !

    .

    Mais celui des humains ! Ah la fameuse

    chienlit des humains ! Laideur et compagnie !

    Désastres et massacres par des abrutis,

    de beautés élaborées par des siècles de leur

    propre culture ! Ils avaient sous la main

    .

    un jardin d’Éden - ils en ont fait un enfer.

     

     

     

    .

    Aÿ ! Que pena !

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    Tant de peines anciennes si loin perdues en chemin

    Le vent gonfle les rideaux blancs ainsi que des spinnakers

    Périple immobile Les flûtes d’Inti Illimani Le lac bleu-acier

    .

    Tu répétais sans fin une ensorcelante mélodie

    qui a survécu à l’avalanche enfouisseuse des siècles

    Quelque part bat un tam-tam derrière les arbres

    .

    Il y a ceux qui ressentent le Temps et ceux qui non

    Le coeur pétrifié en l’image d’une fille brune

    intacte malgré l’usure des choses - dit la chanson

    .

    Il y a aussi Yayo qui fredonnait Juanito Laguna

    remonta un barrilete sur un ton poignant et nostalgique

    Ô moments de la vie dont les refrains nous hantent...

     

     

     

     

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    Cigalons

     

    L’excès de soleil

    rafraîchit l’ombre des pins

    pour l’orchestre ailé

     

     

     

     

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    Équinoxe

    .

    Petit métronome

    qui aggrave la lumière

    Première cigale !

     

     

     

    .

    À la fraîche

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    Face au paysage

    Soir de juin luisant aux feuilles

    Le premier moustique

     

     

     

     

    .

    Inventaire minimal

    .

    L’air qui offre et retire

    des arômes incertains

    Le pur profil que j’aime

    à contrejour des tulles

    de la fenêtre Une rose

    éternelle en son cube

    transparent Ma main

    qu’aimante le clavier

    noir où dorment mille

    sortilèges en puissance

     

     

     

     

    .

    Ainsi ternissent les étoiles...

    .

    Ce qu’il faut d’exigence et de volonté

    au moindre arbrisseau, églantier, aubépine

    pour grandir dans l’inspiration du vent

    jusqu’à fleurir et embaumer – qui le sait ?

    .

    Il y a la foi en l’azur, en le soleil, le doux

    piétinement sur place de la pluie aux mille

    pattes de mouche en chaussons annelés

    Bref la foi en tant de choses éphémères

    .

    ou intimes comme un épanouissement

    de coeur ou un battement de coquelicot

    au bout du champ près la haie quand discret

    dans l’ombre un frais rendez-vous patiente

    .

    Tout commencera par du bonheur certes

    puis insensiblement l’usure de la poésie

    flétrira les couleurs édéniques de la vie

    et l’on sait trop bien ce qu’il en adviendra...

     


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  • Terraqué contemplatif

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    Derrière l’horizon l’oiseau d’or se retire au couchant      dépouillant sur les monts sa mue d’ombre violette      Quelques duvets de feu sont restés accrochés aux vapeurs      gemmes et coraux semés sur leur neige sourde      que piétine une théorie d’angelots chanteurs en train de regagner la nursery d’azur du paradis et son dortoir séraphique au plafond étoilé

    .

    Avec sa bouille blafarde d’hostie      la lune les regarde défiler      en attendant qu’il fasse suffisamment noir pour dérouler son tapis brasillant sur la mer      invite à l’impossible traversée      mais qui ne tente personne excepté peut-être       nues sous leur fourrure d’écume      quelques sirènes lasses de broder et rebroder sans fin l’ourlet du ressac au bord de la plage

    .

    Dissimulé sous les herbes sèches      pas très loin du muret sur lequel je suis assis jambes pendantes      sibilante s’obstine l’alerte électronique d’un grillon      pour avertir les humains qu’il ne fallait pas toucher à la carrosserie de la Nature      et que demain – ou après – inéluctablement vont      sur les délinquants s’abattre les essaims des forces qui la vengeront

    .

    Déjà l’on parle à la télévison de cyclones et d’inondations     Des images épouvantables de gens qui s’efforcent de fuir avec de l’eau jusqu’à la taille le salon de leur maison      alternent avec celles de toits que la tornade emporte en pièces détachées      comme une bourrasque disperse la paille des meules côniques      dressées dans les champs après la moisson

    .

    Quant à moi      qui ne verrai jamais la fin du millénaire      assis sur mon muret en remuant les jambes      j’écoute une à une se taire les cigales      bientôt il n’en reste qu’une      obstinée      hésitante      qui finit par renoncer car le cricri du grillon domine fort la nuit qui tombe      M’envahit soudain l’étrange sentiment      alors que tous les oiseaux se sont tus

    .

    que l’une et l’autre invisibles      créatures du miracle      étonnamment miniaturisées ainsi qu’abeilles ou fourmis      sont pourtant de ma parenté      car comme moi elles ont leur langage      leurs amours      leur musique      leurs parfums préférés      et parce que je peux encore      comme elles     ainsi que le permet simplement d’être en vie      balancer mes jambes

    .

    au-dessus du vide d’un mètre cinquante que ménagent les pierres sèches de la restanque      où le soir je viens rêver sous les pins      installé dans un corps que nulle douleur ne raidit pour l’instant malgré l’âge      (Là méditant vaguement       je songe à ce que pourrait être      sur ce globe d’emprunt à l’existence inexplicable et fascinante     vivre sans la folie des humains !)

     

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  • S’il n’y a pas de feu…

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    S’il n’y a pas de feu, pas d’amour qui parle

    la lumière qui fut dans la lumière s’éteindra

    fragile ainsi que braise d’encens dans le soleil

    ou qu’une source résurgente sous la mer

    .

    Cette source je la vois verte dans tes regards

    lorsqu’ils se mêlent à l’azur implicite en toutes choses

    comme si par les yeux tu pouvais pénétrer au coeur

    du monde où je suis incapable de te suivre

    .

    Il ne me reste, à moi, que le parfum mélancolique

    des giroflées, la poisse odorante des troncs de pins

    couleur de soleil levant, le regard obtus des pierres

    qui de leurs griffes invisibles s’agrippent au sol

    .

    Peut-être parce qu’il serait le sol qui les vit naître

    Peut-être parce que ce serait la terre qui les a serties

    lorsqu’elles ont renoncé pour un peu de mousse à l’élan

    qui les faisait rouler depuis la fracture froide des cimes

    .

    Toi mon amour tu es leur contraire Tu es de vagues

    Et ce qui pour toi suscite un babil d’écume brillante

    c’est la force aveugle qui pousse tes instants vers leur but

    en te mêlant à certain azur implicite en toutes choses !

     

     

     


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